Abbayes vaudoises

Dans le Canton de Vaud, on peut être « Abbé-président » sans aucun lien avec l’Eglise… pour autant que l’on prenne la tête de l’une des 177 confréries de tireurs du canton ! En terres vaudoises, les « abbayes » font en effet aussi bien référence à ces confréries qu’à de grandes fêtes populaires où l’on organise des concours de tir – auxquels peuvent participer les plus entraînés comme les purs néophytes – et où le vin coule à flots. Ces fêtes se déroulent sur quatre jours, entre mai et septembre, et donnent aussi lieu à un cortège, un banquet ou même un bal. Le tout dans des rues décorées par une débauche de fleurs, que celles-ci soient vraies ou faites de papier. Une distribution de prix – très souvent de la vaisselle en étain accompagnée d’une rose – récompense les meilleurs tireurs, tandis que les autres profitent de ce moment privilégié en communauté. Les premières abbayes-sociétés remontent au Moyen âge, la plus ancienne ayant été créée en 1381. On parlait alors de « tir au Papegai » puisqu’il fallait dégommer un perroquet coloré fait de bois, de paille et de tissu, fiché au sommet d’une perche d’une cinquantaine de mètres. Ces sociétés mises en place par les comtes de Savoie exerçaient alors aussi des fonctions paramilitaires, telles le maintien de l’ordre public et la défense des terres. Ce n’est qu’aux XIX^e et XX^e siècles que leur rôle sera remis en question, les transformant en une compétition sportive et pacifique qui se veut aussi fraternelle que patriotique.